Mettre le projecteur sur mes petits camarades pour vous narrer leurs (més)aventures, plutôt que de profiter de tenir la plume pour me porter en avant (… voir plus loin) me semblait un principe de base assez sain (sans T – à la tienne ! répondit P'tit Joël). Oui mais voilà, lesdits camarades qui, depuis le début de la semaine, sont pour moi une source d'inspiration inépuisable (certains plus que d'autres) en sont venus à se demander si je ne manquais pas un peu d'autodérision. Ce serait mal me connaitre, en plus c'est dans les gènes belges !! Je vais donc vous conter mon après-midi de jour de récup'.
Tout commence lundi soir. Histoire de joindre l'utile au sponsoring, nos organisateurs nous rajoutent tous les soirs, en plus du briefing de l'étape du lendemain, une présentation par l'un de leurs partenaires : punch power dimanche, vélo-fitting lundi, cycles Béraud mardi, plateaux rotor jeudi (…quoique, ce dernier il peut rotorner chez lui car après sondage rapide ça n'intéressait personne !). Velo-fitting (de l'anglais fit, adapter, et du français vélo, vélo) consiste donc à adapter le vélo au cycliste (l'inverse est aussi possible, mais plus couteux). Ayant de longue date souhaité faire une étude posturale digne de ce nom, je trouvais là, enfin, l'occasion rêvée. Non seulement on n'a rien d'autre à foutre les après-midi, mais en plus ils font un prix spécial "stage du soleil" (au lieu d'un œil, ça te coûte juste un bras). Mais bon, faut savoir ce qu'on veut ! Voilà donc rendez-vous pris pour ce mercredi 13h30. Un autre cyclo prendra le créneau suivant (durée 2h). Un belge lui aussi. Comme si tous les français étaient persuadés d'être parfaitement positionnés sur leur vélo (question de culture).
Joël, le père de la méthode, et Gaëtan, notre orateur de lundi, se sont déplacés pour nous mesurer sous toutes les coutures. La séance commence par un interrogatoire : 54 ans, 1,90 m, 100 kg (… non môôôssieur je ne suis pas le gros de la troupe… c'est Tiaux !!). Puis on me demande de marcher de long en large, façon défilé de mode. J'ai un peu bronzé, voilà-t-il pas que j'me prends pour Carlo Bruni, avec comme spectateurs curieux Jean-Louis, Jean-Pierre, Jean-Daniel… (non, Daniel tout court), et Alain. Je tenterai bien de leur extorquer 20€ l'entrée au spectacle, mais ça n'a pas pris…
De mon défilé bénévole ressortira que mes pieds pointent vers l'extérieur (c'est pas une tare), que mon bassin est asymétrique, que mon dos est plat d'un côté et bombé de l'autre, et que j'ai une épaule plus haute que l'autre (merci la clavicule ressoudée toute seule). Bref, je suis un peu mal foutu, mais le gars te dit ça plus poliment parce que t'as pas encore payé….
Finalement, il renoncera à mesurer l'étui de secours du tube de selle… J'ai pris mes chaussures toutes neuves (74 km au compteur), car tant qu'à régler l'ensemble au millimètre, autant que soit avec du matériel qui va durer un petit temps. Je monte ensuite sur le vélo et fais quelques tours de pédalier. Constat immédiat : les cales ne sont pas bien réglées. Tu m'étonnes, comme j'avais pas assez serré les vis, j'en avais déjà paumé une le matin, du coup la calle droite dansait le sirtaki sous mon 47-fillette (comme disait Marc Dutroux – humour congolais*). L'occasion de détendre l'atmosphère en montrant tout de suite mon haut niveau de technicité vélocipédique. Daniel fera un saut rapide à notre logis commun pour aller chercher mes "vieilles godasses", histoire de repartir sur des bonnes bases. Ma selle est vrillée (merci le bassin), faudra penser à la changer aussi.
Je remonte donc sur le vélo, et là je me retrouve rapidement comme un romain, bardé** de capteurs (poignet, coude, épaule, bassin, genou, cheville, talon, pied). Il faudra reculer un peu leur "barre de mesure" pour avoir la bête en entier sur l'écran de l'ordinateur. Et c'est parti. Je mouline (71 rpm… chacun son truc) pour une première prise de mesures, mains aux cocottes, puis mains en bas du guidon.
Les sept points de mesure bougent élégamment sur l'écran, où mon bide est magiquement devenu une ligne droite : mon régime commence à porter ses fruits ! Premier verdict : j'ai les cotes d'un sprinteur sur la ligne d'arrivée, les bras tendus et le cul tout en arrière. Ouf, je ne suis pas venu pour rien !! Joël m'explique tous les angles (à la louche, une vingtaine mesurés) et me donne oralement les bonnes "fourchettes" (celles-ci étant leur savoir-faire établi sur 25 ans d'expérience de fitting, les valeurs resteront orales – normal, c'est fait pour ça une fourchette). Je vous la fais courte, mais cette fois il faudra bien accepter de me porter en avant : avancer ma selle (de 2,5 cm quand même) et la rehausser de 5-6 mm pour compenser afin de me retrouver bien positionné sur le vélo selon les critères de Monsieur Fitting. Un point positif, le parcours de mon genou à la poussée et à la remontée dessine deux lignes quasiment superposées : ne cherchez plus, voilà traduites par l'informatique les raisons de mon pédalage si élégant que vous jalousez tous !!
Ce matin, on avait donc une petite étape de 109 km / 1400 m D+ pour valider les nouveaux réglages. Je craignais un peu d'être inconfortable vu le changement de position quand même significatif. Et bien que nenni, et selon mes petits camarades du groupe 3, c'est validé au plan efficacité !! A voir maintenant sur les brevets de 300 km (et plus) comment ça se passe. A demain pour la dernière étape !
* noir et belge à la fois **Un autre cyclo pro suivi par velo-fitting…