En humour, l’important, c’est la chute !
ou une journée de merde à Croth
Je vous avais laissés au soir du 11 novembre (soirée club), non pour fêter l’armistice bardé de médailles du mérite (que je ne possède pas d'ailleurs), mais pour vous retracer, avec la pointe d'humour dont vous me savez coutumier, l'année UVO 2017. Et comme tout le monde le sait, en humour, l’important… C’est la chute !
Celle-ci arrivera le 17 décembre. Non pas qu'il m’ait fallu cinq semaines pour trouver la rime qui suscite l’hilarité… Mais tout simplement fallait-il que soient réunies les conditions pour m’infliger ce qui reste à ce jour (et je m’en réjouis) ma seule chute en 19 années d’UVO (soit approximativement 80 000 km). N’est pas Gégé qui veut ! En ce dimanche 17 décembre, donc, je me lève… et je te bouscule… tu ne te réveilles pas… Euh non, là je m'égare… je ne bouscule personne, si ce n’est mon envie de dormir pour émerger péniblement à 7 h 30 un dimanche d'hiver. Mais depuis l’temps, on a l’habitude : le vélo c’n’est pas un sport de ∆¿√≥Ω∏Ô (censuré puisque de nos jours on ne peut plus rien écrire sans se retrouver cloué au pilori par la bien-pensance ambiante). Bref, je m’apprête comme tous les dimanches pour notre sortie dominicale. Le thermomètre indique 1,5 °C sur les hauteurs d'Orgerus (le Moutier). Par précaution, je vérifie ce que nous prédit Météociel : 4 °C en fin de matinée. Outre-Quiévrain, on appelle ça le début de l’automne. Donc aucune contre-indication pour sortir la bécane. En me rendant vers le point de rendez-vous place de Halles, je rejoins notre K’ptain Jean-Louis et nous bavardons quelques instants. Je lui confie que cette sortie me permettra de passer le cap des 6.000 km, grande première pour moi, une année sans Paris-Brest. Dans sa grande bonté, lui qui vise les 18 000 km annuels m'en félicite d’avance. Esprit de groupe à l’UVO ! Une douzaine de courageux ont bravé le froid. Trop peu pour faire des groupes. Et puis en décembre, ce n’est plus le moment de rouler KOM des bêtes pour faire des moyennes exSTRAVAgantes. Nous partons donc sur le circuit n°1. L'allure est on ne peut plus modérée (un petit 25 de moyenne), le ciel est bleu et les brumes éparses (photo 1). Sur le « périph » de Bû, l’autre Vincent, crève. Devant le cimetière ! La convergence sémantique est trop belle : j’immortalise l’instant sur mon portable (photo2) afin d'en tirer parti dans le compte rendu de la sortie – il me reste une quarantaine de km pour « trouver le bon mot ». Car l’important en humour, c’est la chute ! Jacky et Patrick Gilant continuent leur route sans attendre la réparation, histoire de garder le rythme sénatorial qui leur sied, et peut-être aussi de ne pas prendre froid. Après une dizaine de minutes, nous reprenons la route. Dans la traversée de la forêt de Dreux, l’allure augmente quelque peu, mais reste bien loin des parties de manivelles endiablées auxquelles on s'adonne en pleine saison sur ces longues lignes droites. Nous descendons ensuite vers le Moussel. La route est grasse et étroite ; la prudence est de mise. Le « peloton » s’étire sur plusieurs centaines de mètres. Le regroupement se fera tout naturellement en bas. Au croisement de Croth, je m'élance prudemment dans le sillage de Daniel lorsque surgit une voiture sur notre gauche. Sur injonction présidentielle, une partie des cyclos stoppe toute velléité de mouvement et attend sagement le passage de l'intruse. Ceux qui sont passés (dont je fais partie) se laissent donc aller en roue libre vers le petit pont de l’Eure, histoire de se regrouper tranquillement. Dans l'instant suivant, je me vois me relever en me tenant le bras gauche, conscient que la clavicule a douillé. Que s’est-il passé entre les deux ? Le trou noir. Aucun souvenir. Manifestement il y a eu chute. Pourquoi ? Comment ? Je n'ai rien vu venir. Asbsolument rien. La route tourne à droite, or je suis tombé à gauche. Un défi aux lois de la physique ! Une de mes roues s’est-elle coincée dans une « saignée » (ça ne s'invente pas) de la chaussée, ce qui aurait déséquilibré instantanément le vélo ? Ou la roue avant a-t-elle glissé brutalement sur une plaque de givre ? On ne le saura jamais (France 2 n'avait pas disposé de caméras à cet endroit). Toujours est-il que la chute fut instantanée et, paraît-il, impressionnante. Lourde aussi, comme souvent lors-que l’on tombe à vitesse réduite. Les éraflures superficielles des glissades à haute vitesse laissent alors la place à un choc massif sur tout le flanc. Et vu mon quintal bien pesé… «massif» prend tout son sens ! Le casque a tapé lui aussi (photo 3). Fort. Heureusement qu’il était là celui-là. Témoin de la violence du choc, j’ai quand même déliré pendant une petite demi-heure, jusqu’à l’arrivée des pompiers. Pourtant, dans ma perception post-traumatique, ils ont mis à peine 5 minutes pour arriver, c'est vous dire si j’étais dans le potage. « Cinq minutes » durant lesquelles j’ai paraît-il téléphoné à mon épouse pour l'informer de ma petite mésaventure. Elle : « Dois-je venir te chercher ? » ] Moi : « Non non, ça va, je suis avec mes copains…» ] Elle : « Mais ils vont te conduire aux urgences ?» ] Moi : « Non non, ça va je suis avec mes copains…» ] Elle : « Tu me tiens au courant ?» ] Moi : « Oui mais ça va je suis avec mes copains… » Pas net le mec… Mais merci le casque ! Je vais devoir le jeter, mais sans lui, ça aurait peut-être été le cyclo… Mes compagnons de route ne s’y sont d'ailleurs pas trompés, eux qui, lors de la sortie de la semaine suivante, orneront l’endroit d’une sépulture éphémère (photo4). L’important, après la chute, c’est de garder l’humour ! À l’arrivée des pompiers, je commence tout doucement à recouvrer mes esprits. Le temps pour eux de me momifier pour éviter tout écueil cervical (photo5), et je me retrouve aux urgences de l’hôpital de Dreux. Radio, scanner, attente… Finalement je m’en sors pas trop mal. Clavicule (bien) fracturée (photo6) et multiples contusions sur tout le flanc gauche – on dirait un schtroumpf ! Six semaines de bandage « Dujarier », anti-douleur, trois semaines d’arrêt et patience. Ça tombe bien moi qui voulais prendre quelques jours off pendant les fêtes… M’y voilà contraint et forcé. Quant à la barre des 6.000 km on verra cela plus tard… le compteur 2017 restera bloqué à 5.987 bornes. Ce n'est pas treize important…. Cerise sur le gâteau, quelques jours plus tard, ma cuisse gauche s’ornera d'une excroissance flasque et volumineuse, mais heureusement totalement indolore. Une échographie révèlera un syndrome dit de «Morel-Lavallée» (à vos Google !) - ou collection séreuse entre la peau et le muscle. Typique de chocs violents suite à des accidents en deux roues ou à ski (comme je ne skie pas… CQFD). Je suis assez indifférent aux affres laissées par les accidents de la vie, mais je ne peux rester ainsi : je ne suis pas un Saint Bernard ! La ponction sera donc le remède, affaire en cours… De là à ce qu'ils n'y trouvent que de la triple Leffe… eh oui car malgré les circonstances, je ne me suis pas laissé abattre et le soir même je dégustais ma petite bière dominicale ! L’mportant, après la chute, c'est le houblon ! Une amie pharmacienne me confiera plus tard que, en cette semaine du 18 décembre, elle avait vu défiler pléthore de cyclos ayant chuté en ce funeste week-end. Pourtant, à aucun moment, je n’ai eu l'impression qu’il était déraisonnable de sortir ce dimanche-là (on a déjà fait bien pire). Il n’y a pas eu de faute de roulage, pas d’imprudence, c’est juste la faute à pas de chance. Et encore, relativisons : pas de voiture venant en sens inverse (sinon….), et pas d’autre cyclo entrainé dans ma chute. Les dieux étaient avec nous ! Et on ne le répètera jamais assez, merci le casque ! Quand je croise des cyclos sans casque (heureusement de plus en plus rares), je ne peux m'empêcher de penser qu'il n’y a pas grand-chose à protéger dans leur petite tête. Ces « je-sais-tout » inconscients roulent sans casque avec comme seul excuse, un : « c’n’est pas obligatoire ! ». Ils risquent à tout moment d’anéantir la petite cervelle qui flotte sous leur crâne. Pensez à Coluche, non d’un chien ! : « L’intelligence chez l’homme : quoiqu’il en soit pourvu, il a toujours l’impression d’en avoir assez, vu que c’est avec ça qu’il juge ! »