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La perle des Vosges

"On s'était dit rendez-vous dans 12 ans, même jour, même lieu, mêmes côtes". Mais pas tout à fait mêmes têtes !! Car à côté des fidèles (Bouysset, Alland, Lemaire), les Haincourt, De La Rue, Renard, Rault, Duvigneau, Fauveau, Boulez, Serrié et autre Thomas avaient cette fois pris la place des Rousseau, Ouazi, Daeron, Philippe, Erard, Hiblot, Auchères, Duval, Bonnemaison, Chassan, Setiaux, Huck ou encore Quesnot. Un peu moins nombreux, certes, mais la qualité n'y a rien perdu.

On ne prend pas les mêmes et on recommence


Le mercredi 8 mai, férié comme il se doit, permettait au pont de l'Ascension de jouer les viaducs. Après des mois de météo ardennaise (et ce n'était pas fini, mais on ne le savait pas encore…), les prévisions annonçaient enfin un soleil radieux sur un fond bleu azur. Nous ne pouvions que nous réjouir.

Suite à un contretemps familial, je me retrouve obligé de partir sans ma moitié (dont je serais par conséquent le double – le premier qui ajoute "en poids" viendra me causer à la prochaine sortie). Après quelques coups de fil, Jean-Pierre Duvigneau, lui aussi "single" pour l'occasion, me propose la confortable place de passager (celle "du mort" dit l'adage – prémisses de dénivelés assassins ?). Nous nous fixons donc rendez-vous chez moi à 9h30 pour accrocher mon mulet à son porte-vélo tout neuf.

Oui, j'ai bien dit mon mulet. Car au retour de Liège-Bastogne-Liège, autre symphonie en côte majeur, le Di2 de mon Time "Alpe d'Huez 01" (pseudo approprié pour attaquer l'Alsace) a subitement décidé de se mettre hors d'état de passer la moindre vitesse. Et surtout, totalement réfractaire à la recharge. De réflexion en démontage pour tenter d'identifier le problème, Benoît "Goodbike" (désormais à Beynes) me dit que ce ne peut être que la batterie ("mais ce serait étrange qu'elle lâche d'un coup") ou, plus probable car il en remplace 2 ou 3 par an, le connecteur sous la potence. Pressé par mon physique imposant, il commandera les deux pièces le jour même pour les recevoir le WE suivant – celui précédant la sortie club. Hélas, effets collatéraux de la crise ukrainienne ou de l'enthousiasme Trumpiste, toujours est-il que le mardi 7 mai les pièces ne sont toujours pas arrivées. Me voilà donc obligé de faire la sortie club avec ce vélo Look KG 461, pourtant si désirable lorsque je l'achetai en 2003. Le temps passe pour tout le monde. Stéphane Lelostec, sors de ce corps !

Le mulet


Vers 9h50, nous voilà donc partis avec mon pilote Jean-Pierre. A 10h05, alors que nous passons à hauteur du radar de La Queue sur la N12, mon téléphone m'envoie quelques vibrations : "Allô Mr Goffin, c'est Benoît de Goodbike : vos pièces sont arrivées". Aaaarrggllll !!! Trop tard, on est partis.

Au bout de 7 heures d'un agréable co-voiturage – oui, 7 heures, car Munster a beau n'être qu'à quelque 520 km d'Orgerus, les autoroutes vosgiennes sont aussi rares qu'un succès français à Roland Garros - nous arrivons donc à la Perle des Vosges, tout de rose vêtue, accrochée au mont Gaschney. Mont Gaschney que notre G.O. Daniel avait subtilement rebaptisé Chasney dans un de ses mails préparatoires. On n'était pas loin du Chutney et son foie gras… j'y reviendrai.

Alors que tout le monde est encore sur les départementales vosgiennes, les 2D très matinaux se font le Gaschney en avant-première


Daniel nous avait prévenus : pour les réservations, il avait eu "des échanges très cordiaux avec Maryse et Carine", tenancières de la Perle des Vosges. Il ne nous faudra pas plus de dix minutes pour comprendre qu'il avait dû échanger surtout avec Carine ! Car Maryse… c'est quelque chose ! Une main de fer dans un gant de fer (comme disait Gaston) qui règne sur les lieux depuis 53 ans. Rien ne lui échappe, elle vous épie en permanence, et vous rectifie si vous mettez un orteil hors du droit chemin. Un peu pince-sans-rire aussi, donc on ne sait jamais trop si c'est du lard ou du cochon. Alain s'en souvient encore : alors qu'il demandait timidement un peu de moutarde pour accompagner sa choucroute, il lui fut répondu que l'on ne mangeait pas de moutarde avec la choucroute à la Perle des Vosges. Et vlan.

Jour 1


Mais parlons vélo. Il y avait donc deux groupes de cyclos. Enfin, deux et demi. Le G3, sous la houlette de Pascal Boulez, et le G2 patronné par Daniel. Et puis le G1, avec Dominique Haincourt qui se suffit à lui-même.

Le mercredi soir, Eric me souffle dans l'oreille (la moins sourde que l'autre) qu'il roulera le lendemain avec le G3. "Pour accompagner Christine ?" lui demandé-je naïvement. Non, car le G3 fait un circuit plus long que le G2. Vérification faite, il avait raison le bougre : 94km et 1800 m D+ (G3) contre 83 km et 1700 m D+ (G2). Tout fout l'camp mon brave monsieur !

Les gros (pas cuits) mollets du G2 se feront le "Chutney" sans le foie gras - comprenez qu'avec 77 km/1506 m et une chaleur à laquelle le printemps finlandais des Yvelines ne nous avait pas habitués, votre serviteur avait eu sa dose pour ce premier jour.

Le G2 retiendra surtout de cette journée une pause déjeuner dans le super "lavoir" décoré du sol au plafond et où nous avons testé les trois bières au fût disponibles et dégusté de magnifiques tartes flambées. Sans moutarde, mais avec houblon !

Superbe pause méridienne "Ô lavoir"


Dire que pendant ce temps-là le G3 vivait un réel calvaire…

Calvaire ou bière à volonté…. "c'est mon choix" !


Jour 2


Alors que les forçats du G3 s'étaient concocté un jour 2 plutôt tranquille (96 km / 900 m), l'étape 2 du G2 se profilait comme le gros morceau du séjour : le Grand Ballon culminant à 1350 m, et un total de 124 km et 2450 m annoncés. Je ne vous parle pas du G-Haincourt qui n'avait de court que le nom, avec ses 145 km / 3200 m. Rien qu'à l'écrire j'ai des crampes.

Le J2 tranquille du G3


La journée commence par le col de la Schlucht (ou Shlut ou Sclhoutch… Strava accepte toutes les ortaugraffes !). Un truc fait pour moi : 18 km de montée régulière culminant à 5%. J'avais le souvenir très clair de 2012 que ça se montait très bien, en 1h15 à peu près. Je partis donc confiant dès le pied, emmenant le groupe sur un train régulier (diesel diront certains) que je tiendrai jusqu'à 2 km du sommet, lorsque la fatigue commença à se faire sentir. Faudrait pas déconner non plus, je ne vais quand même pas passer les cols devant Daniel !

Un faux-col, de quoi éviter la mise en bière !


Les crêtes nous offraient un paysage magnifique, et une météo plus clémente que la veille où les cyclos du G3, "crêtins" avant nous, avaient souffert du vent vosgien.

Entre Vosges et Alsace


Le col du Bramont, que nous prenons à 500m de son sommet, ne sera qu'une formalité. Alain eut quelques sueurs froides dans la descente par la faute d'une direction devenue subitement parkinsonienne.

Une intervention de SOS-AllandMécanotoutpourlevélo.com et tout rentre rapidement dans l'ordre. Chacun son métier.

Good vibes, bad vibes


La descente du col suivie de la vallée de la Thur nous offre un long moment roulant (-1%) nous faisant croire que la vie est belle. On casse la croute au soleil sur la terrasse d'une guiguette au bord de l'eau, pendant que Dominique s'offrait pour déjeuner les deux cols d'une boucle supplémentaire d'une bonne vingtaine de kilomètres. Il nous rejoindra par la suite dans la vallée, avant que les choses ne se compliquent. Le temps que Daniel et Jean-Pierre se fassent piquer par deux gilets jaunes ("Yellow jacket" en anglais, comprenez des guêpes), et nous repartons dard-dard vers "the big balloon".

Celui-ci se monte en deux fois. D'abord un bon 8 km à 7-8% pour ce col sans nom dans lequel nos grimpeurs s'évadent, laissant derrière eux votre serviteur et Frédéric, maire de tous les maux. Le temps d'une petite descente pour arriver au vrai "big balloon", et c'est reparti pour 6 km à 7-8%. Dans le creux qui sépare les deux côtes, Fred hésite… j'y vais ou j'y vais pas ? Nous entamons la montée ensemble à un bon 8 km/h en vitesse de pointe, bien décidés à avaler l'ogre alsacien. Las, au bout d'un kilomètre, Fred me dit qu'il s'arrête, son palpitant jouant des castagnettes.

- Je vais monter en stop
- T'es sur ?
- Oui pas de problème, vas-y

Je reprends donc mon traintrain beaucoup moins vigoureux que dans la Schlucht. A 2 km du sommet, voilà-ti pas que je vois passer mon ami Fred bien installé dans un camping-car, vélo accroché à l'arrière ? Ouvrant sa fenêtre, il me demande si je veux monter à ses côtés : tant qu'à mourir, autant que ce soit dignement, sur le vélo ! Ils m'auront attendu un long moment tout en haut, et Fred m'offrira la bonne bière fraiche méritée à la sueur de mes mollets (cuits aussi cette fois). Le retour ne sera qu'une formalité, tout en descente ou presque.

Je préfère les petits ballons !


Pendant ce temps-là, le G3 se la coulait douce, et au vu des photos envoyées en cette journée pentue, j'avais manifestement mal choisi mon groupe !

faites du vélo qu'y disaient…


Jour 3

Le troisième et dernier jour se profile. Ribeauvillé pour le G2, et Fribourg pour le G3 (le Fribourg allemand hein, le suisse est un peu loin… c'est le G3 quand même, par l'ironman). Les efforts de la veille se font sentir dans les cols de Freland et de Wettstein, mais plus la journée avance, plus les choses rentrent dans l'ordre.



A Ribeauvillé, on s'arrêtera à la même terrasse qu'en 2012, celle du premier coin de la première rue piétonne. Pas téméraire le cyclo affamé. Dominique nous y rejoindra après avoir grimpé tout ce qui pouvait se grimper dans la région (je parle des cols).



Et pendant ce temps-là, le G3 se paumera dans la cambrousse germanique, se retrouvant obligé d'inventer le biathlon moderne pour retrouver des routes carrossables.

Les ravages de l'alcool, mon brave monsieur…



Et comme à l'UVO on aime que les histoires de vélo se terminent bien, Pascale et Hervé, nos experts es vins émigrés depuis quelques mois en Avignon, nous offriront quelques bulles fort appréciées en guise d'apéritif de fin de séjour.

Maryse a laissé faire, comme quoi on a du marcher droit pendant ce long week-end, sans que la moutarde lui monte au nez.



Rendez-vous en 2036... même jour, même lieu, mêmes côtes !


••• Vincent Goffin